Les esprits animaux

Des objectifs d’inflation bas peuvent amener les économies à atteindre la limite inférieure de zéro pendant les périodes déflationnistes causées par des chocs même légers. Dans de telles circonstances, les banques centrales perdent leur capacité à stimuler l’économie. Cette colonne évalue le risque que cela se produise à l’aide d’un modèle qui endogénéise l’optimisme et le pessimisme auto-entretenus dans l’économie. Compte tenu du pessimisme chronique intrinsèque des agents en période de récession, les banques centrales devraient relever leurs objectifs d’inflation à 3 ou 4 % pour préserver leur capacité à stimuler l’économie en cas de besoin.
Une cible d’inflation trop proche de zéro risque de pousser l’économie en territoire d’inflation négative même en cas de chocs légers. Pendant les périodes de déflation, le taux d’intérêt nominal est susceptible d’atteindre la limite inférieure de zéro (ZLB). Lorsque cela se produit, le taux d’intérêt réel ne peut plus baisser. Dans un tel scénario, la banque centrale perd sa capacité à stimuler l’économie en période de récession, risquant ainsi de prolonger les récessions qui se produisent (Eggertson et Woodford 2003, Aruoba et Schorfheide 2013, Blanchard et al. 2010, Ball 2014).
Dans un nouvel article, nous utilisons un modèle macroéconomique comportemental pour apporter un nouvel éclairage sur la nature de ce risque (De Grauwe et Ji 2016). Ce modèle se caractérise par le fait que les agents connaissent des limitations cognitives les empêchant d’avoir des anticipations rationnelles, et les forçant à utiliser des règles empiriques simples pour prévoir l’écart de production et le taux d’inflation. C’est un modèle qui produit des vagues endogènes d’optimisme et de pessimisme (esprits animaux) qui, de manière auto-réalisatrice, alimentent le cycle économique (De Grauwe 2012). L’utilisation de ce modèle conduit à trois conclusions principales.
Premièrement, notre modèle comportemental prédit qu’avec un objectif d’inflation de 2 % (et en supposant des paramètres de règle de Taylor standard), la probabilité d’atteindre le ZLB est d’environ 20 %. Ce résultat contraste avec les modèles DSGE linéaires standard, qui ont eu tendance à sous-estimer la probabilité d’atteindre le ZLB (Chung et al. 2012). La plupart de ces modèles ont conduit à la prédiction que lorsque la banque centrale maintient un objectif d’inflation de 2 %, il est très peu probable que l’économie soit poussée dans le ZLB (Reifschneider et Williams 2000, Coenen 2003, Schmitt-Grohe et Uribe 2007 ).
Deuxièmement, nous constatons que lorsque l’objectif d’inflation est trop proche de zéro, l’économie peut être saisie par un « pessimisme chronique » qui conduit à une dominance d’écarts de production négatifs et de récessions, et à son tour se répercute sur les attentes, produisant de longues vagues de pessimisme. . Le mécanisme qui produit ce pessimisme chronique peut être décrit comme suit. Les mouvements endogènes des esprits animaux produisent régulièrement des récessions et des taux d’inflation négatifs. Lorsque cela se produit, la banque centrale ne peut pas utiliser son taux d’intérêt pour relancer l’économie et augmenter l’inflation car le taux d’intérêt nominal ne peut pas devenir (suffisamment) négatif. Lorsque l’inflation devient négative, cela implique aussi que le taux d’intérêt réel augmente pendant la récession, aggravant celle-ci et augmentant le pessimisme. L’économie peut rester longtemps coincée dans ce cycle de pessimisme et d’output gap négatif.
Sans surprise, lorsque la cible d’inflation est proche de zéro, l’écart de production et le taux d’inflation seront poussés plus souvent en territoire négatif que lorsque la cible est fixée plus loin de zéro, produisant ainsi davantage de périodes de pessimisme chronique. En d’autres termes, lorsque l’objectif d’inflation est fixé trop près de zéro, la distribution de l’écart de production est biaisée vers le territoire négatif.
La question est alors de savoir ce que signifie « trop ​​proche de zéro ». Les simulations de notre modèle, utilisant des calibrages de paramètres que l’on retrouve généralement dans la littérature, suggèrent qu’un niveau de 2 % est trop faible, c’est-à-dire qu’il produit une asymétrie négative dans la distribution de l’output gap. La figure 1 présente l’asymétrie de l’écart de production en fonction de l’objectif d’inflation. Nous constatons que pour les objectifs d’inflation inférieurs à 3 %, l’asymétrie est négative, c’est-à-dire que la distribution de l’écart de production est biaisée vers la gauche avec plus d’écarts de production négatifs que positifs. Une cible d’inflation comprise entre 3 % et 4 % se rapproche davantage de la production d’une distribution symétrique de l’écart de production.
Le skewness négatif de l’output gap est lié à l’asymétrie des esprits animaux lorsque l’objectif d’inflation est bas. Dans notre modèle, nous mesurons l’esprit animal par un indice reflétant les fractions d’agents qui font une prévision positive ou négative de l’output gap. Lorsque tous les agents font une prévision positive, l’indice est de 1, et lorsqu’ils font tous une prévision négative, l’indice est de -1. Lorsque les prévisions positives et négatives s’équilibrent, l’indice est de 0. Ainsi, notre indice mesure l’optimisme et le pessimisme quant à l’écart de production futur. Dans la figure 2, nous montrons la relation entre l’esprit animal moyen et le niveau de l’objectif d’inflation. On observe que lorsque la cible d’inflation est basse, les agents sont en moyenne pessimistes. En ce sens, des cibles d’inflation faibles créent un pessimisme chronique quant aux conditions économiques futures.
Un troisième résultat concerne la crédibilité de la cible d’inflation. Notre modèle donne une définition précise de la crédibilité comme la fraction d’agents qui utilisent l’objectif d’inflation annoncé comme règle empirique pour prévoir l’inflation. Il s’avère qu’une cible d’inflation de 3 % ou 4 % a plus de crédibilité qu’une cible de 2 %. La raison est liée à ce que nous avons dit plus tôt – avec un objectif d’inflation de 2%, l’écart de production et l’inflation sont plus souvent poussés en territoire négatif que lorsque l’objectif d’inflation est de 3% ou 4%. Une fois que ces variables sont en territoire négatif, le pouvoir de la banque centrale d’influer sur l’écart de production et l’inflation est affaibli. En conséquence, le taux d’inflation observé s’écartera plus souvent de l’objectif, minant ainsi la crédibilité de la banque centrale.
Notre analyse conduit à la conclusion que les banques centrales devraient relever l’objectif d’inflation de 2 % à une fourchette comprise entre 3 % et 4 % (voir aussi Blanchard et al. 2010 et Ball 2014 à ce sujet). Une question que nous n’avons pas analysée ici est de savoir comment les périodes de pessimisme prolongé, produites par une cible d’inflation trop basse, affectent la croissance à long terme. Il n’est pas déraisonnable de croire que le pessimisme chronique fait baisser l’investissement de manière persistante, faisant ainsi baisser la croissance à long terme. Comme nous n’avons pas intégré ces effets de croissance à long terme dans notre modèle, il est difficile de tirer des conclusions précises. Nous laissons cette question pour de plus amples recherches.

Les parfums

Le sens de l’odeur produit des réponses ambivalentes qui sont attestées depuis les premières traces de la tradition humaine. Prisonnier de l’olfaction, séduit par les parfums et capable de les composer, le type tend à inverser la bestialité soupçonnée dans l’utilisation de ce sens : le parfum a été très tôt le moyen d’honorer les divinités avec l’onction des pierres votives et des statues. Exposés aux gaz du corps, les hommes brûlaient des aromates sur les autels, et la fumée qui s’élevait en volutes pour les dieux était un symbole perceptible de leur prière. L’inhalation d’arômes parfumés a été développée plus tôt comme une implication magique dans le sacré. La dialectique de l’odeur et du parfum se déploie tout au long de l’histoire dans un cadre spirituel ou séculaire, ancien ou moderne. Le parfum est définitivement la métaphore de la salubrité éthique et physique réelle, le contraire de la souillure, marquant exactement ce qui menace le corps et l’âme de corruption, parfum Lyon de puanteur et de perte de vie. La différence entre odeur et parfum correspond à l’écart entre animalité et divinité, putrescibilité et immortalité, corruptibilité et immortalité. Le rôle sociologique du parfum, inséparable de sa fonctionnalité ontologique, peut être compris à partir de ceux de l’odeur, son antithèse. De l’Antiquité à nos jours, le parfum continue d’être inconsciemment mobilisé comme un défi au naturel, une transfiguration du sensuel, un vecteur du magique.

La percée de Marcel Detienne d’une mythologie du parfum dans la Grèce antique a rétabli notre vision de l’anthropogonie en y ajoutant la dialectique évoquée plus haut : lorsque Prométhée, en instituant le compromis, donne aux dieux la fumée parfumée s’élevant de l’autel, et aux hommes les viandes, la division entre immortalité et mortalité n’est pas impactée par le corps, mais par la nourriture : la fumée des cigarettes ou l’ambroisie, substances intangibles et embaumées consacrées aux dieux, leur épargnent les restrictions de la corporéité physique pour leur assurer une jeunesse perpétuelle et parfumée ; l’ingestion de chair corruptible condamne les hommes à la viscéralité, aux mauvaises odeurs et à la perte de la vie. L’oblation d’arômes vérifie l’immortalité divine ; par contre, les odeurs physiques de l’être humain, seulement masquées par le parfum et garanties de régner en expertes au-delà du sérieux, symbolisent l’impureté et la mort. La langue confirme l’entente : le compromis, thuein, établit le lien et la distance entre les dieux et les hommes, et l’encens, connu en Grèce vers le sixième siècle avant J.-C., peut porter le nom donc, (tus en latin). Rome renforce la vocation lustrale et desséchante du parfumé et lui confère une fonction d’immortalisation : des vases de parfum dans les tombes combattent la décomposition puante et l’humidité ténébreuse.

Le guide plus mature de la pratique égyptienne de l’embaumement n’en est pas moins démonstratif. Outre l’éviscération du corps et son aromatisation, le rituel conservé de la Réserve des Sans-Vie établit une homonymie continue entre impureté et puanteur, pureté et parfum. Osiris N dédaigne l’excrément et le péché avec le même discours ; sa rédemption est la même qu’une lustration parfumée, la conversion de l’impureté malodorante, charnelle, viscérale et éthique en une salubrité encensée, corporelle et religieuse. Le parfum est définitivement le changement de la disgrâce, l’oubli de l’ignoble lié à la puanteur, à la putréfaction et au mal. L’odeur suspecte est associée à l’humide, au pourri et au sombre, et contredit la sécheresse, l’incorruptibilité et le soleil liés aux aromates.

Tout au long de l’Antiquité, les méthodes thérapeutiques et la civilité pure et simple, se sont jointes à l’usage religieux du parfum aggravant la partition sociale en raison du coût plus élevé des parfums. Hippocrate professe l’aromathérapie qui, relayée par Galien, est prise en charge dans les pays européens jusqu’au XVIIIe siècle, et même plus tard, notre époque l’ayant vu renaître. Les effluves balsamiques diffusées par la fumée des braseros purifient l’environnement, le débarrassant des miasmes, de même que le parfum respiré « recrée merveilleusement le cerveau » (Jean de Renou, 1626, offert par Georges Vigarello, 1985) ; à l’inverse, la puanteur est assurément un indice de décadence et de pandémie (le verbe empester, en ligne depuis 1575, désigne le trouble en plus de l’empuantissement).

Par ailleurs, l’usage croissant des aromates tout au long de l’Antiquité a contribué à l’édification de la civilisation élitiste et transformiste. La révélation du parfum, au théâtre ou chez un invité, détermine une commensalité comparable à celle du vin enivré en commun. Le parfum purifie et unit, tout comme la puanteur éloigne, ainsi que l’odeur des mauvais soucis comme une note de la corruption prochaine du corps. Les civilisations décadentes mélangent les trois utilisations du parfum, cultuelle, médicale et interpersonnelle ou sensuelle, dans une mimétique d’immortalisation dont les excès ont été dénoncés différemment à Rome par Pline l’Ancien, Martial, Tacite ou Pétrone. Les capacités de métamorphose (les Métamorphoses d’Apulée), ainsi que de rajeunissement (les histoires de Leucothoe, Idotheus, Phaon, Phoenix arizona, les Fables d’Esope, etc.), attribuées au parfum, euphémisation de l’immortalité divine, vérifient son effet interpersonnel et social.

parfum (10)

Connaissance Acquise Des Managers

Malgré le lien apparemment évident entre bonne gestion et performance de l’entreprise, établir un lien de causalité entre les deux est en réalité assez délicat. Cette colonne examine comment les entreprises portugaises ont réagi à la fin soudaine et inattendue de la guerre civile en Angola en 2002, et découvre une augmentation immédiate des taux d’entrée à l’exportation pour les entreprises ayant au moins un directeur ayant une expérience antérieure de l’exportation vers l’Angola. Ce résultat sur l’impact des connaissances acquises sur la performance est particulièrement utile pour les entreprises qui cherchent à opérer sur les marchés étrangers.
L’énorme variation de la performance des entreprises est devenue un centre d’intérêt empirique et théorique dans toutes les sciences sociales, y compris l’économie. Le sujet est à la fois complexe et passionnant. Les entreprises sont des organisations à multiples facettes – allant des petits acteurs régionaux aux grandes multinationales – où les facteurs technologiques, sociaux, institutionnels, historiques et humains interagissent tous. Dans un monde aussi complexe, une tendance récente dans la littérature est de se concentrer sur, comme le dit efficacement Syverson (2011), « le chef d’orchestre » :
Les managers sont les chefs d’orchestre d’un orchestre d’entrée. Tout comme un mauvais chef peut conduire à une cacophonie plutôt qu’à une symphonie, on pourrait s’attendre à ce qu’une mauvaise gestion conduise à des opérations de production discordantes.
Dans l’esprit de la citation de Syverson, des études empiriques récentes ont exploité la disponibilité croissante d’informations sur les pratiques managériales et les caractéristiques des managers pour établir un lien étroit avec la productivité de l’entreprise (ainsi que du pays) et d’autres dimensions de la performance. Plus précisément, Bloom et Van Reenen (2010), Bloom et al. (2013), Bloom et al. (2016b), et Guiso et Rustichini (2011), entre autres, ont établi que de meilleurs managers et pratiques managériales conduisent à une meilleure performance de l’entreprise.
Même si cela peut sembler évident pour beaucoup, y compris pour les praticiens et les hommes d’affaires, établir un lien de causalité entre les dirigeants et la performance de l’entreprise est en réalité assez délicat en raison de la présence de nombreux facteurs non observables corrélés et de forts effets de sélection au travail. En même temps, ce qui est vraiment intéressant dans cette littérature, c’est l’ampleur des effets implicites. Avoir de bons gestionnaires et de bonnes pratiques de gestion, c’est comme avoir une technologie de production supérieure et est au moins aussi important que les investissements clés de l’entreprise comme l’innovation, le capital et les ressources humaines.
Nous pensons que la prochaine question à aborder dans cette littérature est ce qui se passe lorsque les dirigeants passent d’une entreprise à une autre. Une entreprise qui engage un bon manager améliore-t-elle ses performances ? De combien? Si oui, est-ce dû aux capacités intrinsèques du gestionnaire ou est-ce dû aux connaissances et aux capacités que le gestionnaire a acquises dans les entreprises précédentes ? Qu’advient-il de l’entreprise lorsque le « bon » gestionnaire quitte ?
Dans un article récent, nous apportons des réponses à ces questions (Mion et al. 2016). Nos résultats sont évidemment importants pour comprendre la performance d’une entreprise. Ils sont également potentiellement cruciaux au niveau agrégé, c’est-à-dire au niveau régional ou national. La présence de flux de connaissances signifie que les politiques affectant directement les compétences et les connaissances managériales dans certaines entreprises se répercuteront tôt ou tard sur d’autres entreprises1.
Nous sommes confrontés à deux défis. La première consiste à séparer les capacités intrinsèques d’un gestionnaire des connaissances et des capacités qu’elle a acquises dans les entreprises précédentes. La seconde montre que ces connaissances et capacités acquises ont un impact sur la performance actuelle de l’entreprise. Nous les traitons en exploitant des données exceptionnellement riches pour une petite économie ouverte – des données sur le commerce international au niveau entreprise-pays-produit et des données de panel employeurs-employés appariées couvrant les entreprises portugaises de 1997 à 2005 – et une puissante combinaison de conceptions économétriques.
Afin de séparer les capacités intrinsèques d’un manager des connaissances et capacités qu’il a acquises dans des entreprises précédentes, nous utilisons des informations indiquant si le manager a travaillé dans le passé pour des entreprises exportant vers un pays de destination spécifique ou un produit spécifique. Nos données sont alors suffisamment riches pour permettre de contrôler à la fois les non observables du manager et de l’entreprise et d’éliminer toutes les capacités invariantes dans le temps du manager, ainsi que la performance globale de l’entreprise.
Afin de montrer que ces connaissances et capacités acquises ont un impact sur la performance actuelle de l’entreprise, nous relions la mesure des connaissances acquises spécifiques à la destination ou spécifique au produit (par exemple, l’expérience dans l’exportation de chaussures) à la performance commerciale actuelle de l’entreprise dans ces mêmes destinations ou produits spécifiques ( exemple la probabilité d’exporter des chaussures). Nous abordons l’endogénéité de l’embauche de deux manières complémentaires. Premièrement, nous nous concentrons sur un sous-ensemble de données et explorons la performance différentielle des entreprises avec et sans dirigeants ayant une expérience d’exportation spécifique à l’Angola à la suite d’un événement exogène, à savoir la fin soudaine de la guerre civile angolaise en 2002. Deuxièmement, nous nous appuyons sur la nature du panel de l’ensemble des données et utilisons des informations indiquant si l’entreprise avait des dirigeants ayant une expérience d’exportation spécifique à la destination ou au produit trois ans avant d’évaluer la performance de l’entreprise dans ces destinations ou produits.
La première étape pour établir une relation entre les expériences d’exportation apportées par les dirigeants dans une entreprise et la performance commerciale de l’entreprise consiste à évaluer si l’expérience d’exportation correspond à une prime salariale. Nos analyses de régression indiquent une prime de près de 3 % après contrôle des effets fixes des travailleurs et des entreprises, ainsi que d’un certain nombre de caractéristiques des travailleurs et des entreprises variant dans le temps. Les gestionnaires ayant une expérience de l’exportation sont généralement jumelés à de « meilleures » entreprises et proviennent d’entreprises plus productives. Néanmoins, ils reçoivent toujours une prime salariale importante — la moitié de la prime qu’ils reçoivent pour être des gestionnaires — lorsqu’ils ont de l’expérience à l’exportation.2
Passant à l’expérience d’exportation et aux performances commerciales des entreprises, les figures 1 et 2 montrent la probabilité de commencer à exporter vers une destination donnée ou un produit donné, en 2005, pour trois catégories d’entreprises : celles qui n’ont pas de dirigeants ayant une expérience en exportation, celles qui ont au moins un gestionnaire ayant une expérience à l’exportation, et ceux qui ont au moins un gestionnaire ayant une expérience spécifique (à la destination ou au produit) à l’exportation.
Dans tous les cas, la présence de gestionnaires ayant une expérience à l’exportation est associée à une probabilité plus élevée de commencer à exporter, tandis que le fait d’avoir au moins un gestionnaire ayant une expérience spécifique à l’exportation est associé à une probabilité encore plus élevée.3 Dans notre article, nous rapportons résulte d’un vaste ensemble de régressions — dans certains cas contrôlant les effets fixes année-entreprise — qui confirment les schémas illustrés dans les figures. La présence d’un manager ayant une expérience spécifique à l’exportation augmente la probabilité de commencer à exporter de 2 à 4 %, ce qui correspond à peu près à la moitié de la probabilité inconditionnelle de commencer à exporter vers une destination spécifique ou un produit spécifique.
Nous renvoyons le lecteur au document pour des résultats supplémentaires concernant la probabilité de continuer à exporter, la marge intensive des exportations, ainsi qu’une discussion sur diverses questions économétriques.
Nous nous concentrons ici, à la place, sur l’une des multiples façons dont nous traitons l’interprétation causale de nos résultats : la performance différentielle des entreprises avec et sans dirigeants, avec une expérience d’exportation spécifique à la destination à la suite de la fin soudaine de la guerre civile angolaise. . L’Angola est une ancienne colonie portugaise qui entretient toujours des liens commerciaux étroits avec le Portugal et appartient à la Communauté des pays de langue portugaise (CPLC).
La guerre a commencé de nombreuses années avant notre période d’observation (1997-2005) et s’est terminée brutalement avec la mort du chef des rebelles, Jonas Savimbi, le 22 février 2002. Comme discuté dans Guidolin et La Ferrara (2007), l’événement était complètement inattendu et représente un événement exogène lié au conflit. Cela signifie que, juste après le choc, les entreprises n’ont pas eu le temps de se préparer à profiter des opportunités offertes par le nouveau cadre politiquement stable, par exemple en embauchant des managers ayant une expérience de l’exportation en Angola. Pourtant, certaines entreprises en 2002 avaient déjà des cadres ayant une expérience de l’exportation en Angola, tandis que d’autres n’en avaient pas.
La figure 3 montre les taux d’entrée à l’exportation pour les entreprises ayant au moins un directeur ayant une expérience spécifique à l’exportation en Angola et les entreprises sans un tel directeur. Conformément à nos résultats précédents, les taux d’entrée pour le premier groupe sont toujours plus élevés que pour le second groupe. Fondamentalement, il y a eu une augmentation soudaine des taux d’entrée à l’exportation pour les entreprises ayant au moins un dirigeant ayant une expérience de l’exportation en Angola en 2002. La situation est ensuite un peu mitigée après 2002, ce qui peut être compris avec d’autres chocs en cours ainsi que des entreprises ayant eu le temps de s’adapter à la nouvelle situation. Les résultats de régression rapportés dans notre article confirment que, même en contrôlant les covariables temporelles de l’entreprise et les variables fictives de l’année, la présence d’un manager ayant une expérience dans l’exportation vers l’Angola augmente la probabilité de commencer à y exporter de 2 % (par rapport aux entreprises sans un tel manager ).
Dans le reste de notre article, nous présentons des résultats supplémentaires concernant l’arrivée et le départ — par opposition à la présence et à l’absence — de gestionnaires ayant une expérience en exportation, ce qui concorde avec l’idée que les gestionnaires apportent de nouvelles connaissances en matière d’exportation et, dans certains cas, ces connaissances restent en place. l’entreprise même après le départ des dirigeants. Nous montrons également que l’expérience d’exportation est plus précieuse pour les entreprises vendant des produits plus différenciés (c’est-à-dire des produits dont les attributs sont plus difficiles à observer) et des produits nécessitant plus de financement (par exemple, en raison de processus de production plus longs et d’une plus grande inadéquation entre les investissements et les bénéfices, ce qui nécessitant plus d’efforts de gestion et d’expertise). Enfin, nous constatons que l’embauche d’un gestionnaire ayant une expérience de l’exportation peut aider les entreprises à continuer d’exporter vers des marchés étrangers caractérisés par une concurrence croissante des importations en provenance de Chine.